• le chat de platine

    le chat de platine
    8


    - Retourne dans ton compartiment et demeures-y jusqu'à nouvel ordre, dit M. Colerette à Marinon. Cette fois, tu as trébuché fort à propos mais nous n'aurons pas toujours cette chance !
    Resté seul, le détective se dit qu'en restant où il était, il risquait un coup de feu tiré à travers la portière.
    - De toute façon, l'homme est coincé. Inutile de tenir cette main. Je vais appeler le chef de train, qui ira chercher du renfort. Je surveillerai la porte en attendant. L'arrestation sera facile.
    Il relâcha sa pression; la main disparut à l'intérieur.
    Cependant Jean-Jacques et sa soeur, accroupis sur leurs couchettes, épiloguaient sur les événements de la nuit.
    - Une chose est claire, dit Ygrec. Vise-à-gauche a été dupe d'une tactique adacieuse, que seule ton intervention opportune a empêchée de réussir. Parmi les voyageurs du rapide, il y avait un et peut-être deux membres de la bande du Double-Six. Le pseudo marquis italien vola de menus objets dans les wagons d'arrière, exactement comme on sème des miettes de pain pour attirer les moineaux. Il s'agissait de provoquer dans les heures qui suivraient une enquête personnelle de M. Colerette, enquête qui devait l'entraîner au bout du train avec la valise au trésor. Et un guet-apens était préparé sur le chemin du retour.
    - Comment l'auteur de ce guet-apens comptait-il s'enfuir avec son butin ?
    Jean-Jacques allait répondre, quand un bruit caractéristique se fit entendre le long du train qui ralentit, s'arrêta...
    - Il n'y a pas de gare ici, s'étonna Marinon. Le prochain arrêt, à Valence, n'est prévu que dans une demi-heure !
    - Pourvu que..., commença le jeune garçon.
    Bravant toutes les consignes, il s'élança dans le couloir. Derrière lui, Marinon rassurait la vieille bonne que cet arrêt brusque avait réveillée en sursaut et qui croyait à un accident.
    - Ce ne sont pas des manières ! grommelait-elle. Colonel est tombé du filet et a failli se casser une patte !
    Le ras, de son côté, protestait avec véhémence, en se frottant une bosse qui venait de lui pousser sur le front :
    - Qu'est-ce que tu avais mis devant mon lit pour m'assommer au moindre choc, esclave et fils d'esclave ? demandait Sa Seigneurie à son chambellan consterné.
    Répétant et répétant encore les trois petits saluts rituels, Tiffon-Palamos répondit :
    - J'avais mis le paravent, Seigneur. Le paravent représentant un camp militaire. Car il est écrit :
    "Tu reposeras au milieu des tentes de tes soldats".
    - Les tentes de mes soldats me sont tombées sur le crâne. Il n'est pas écrit :
    - Tu seras à demi écrasé sur ta couche par la faute d'un imbécile !"
    Et, changeant de ton :
    - Pourvu que ce heurt brutal n'ait pas endommagé les vingt boîtes de mon petit chemin de fer !
    Jean-Jacques, à la neuvième voiture, trouva son oncle bien déconfit, en compagnie du chef de train :
    - Le gredin a tiré la sonnette d'alarme ! marmottait M. Colerette.
    Devant lui, le compartiment était vide; la fenêtre donnant sur la voie grande ouverte. Dans le filet, avec la mallette à l'étiquette, il y avait un manteau de spahi...
    A l'intérieur de la mallette, on trouva un jeu de dominos, jeu qui, chose curieuse, contenait, non un double-six, mais deux... Le train repartit. A Valence, le chef de train fit sa déclaration. Le jour pointait. Le "cerveau numéro 1" avait reprit son poste au wagon(restaurant, sous la garde de deux agents. C'est alors qu'il reçut une déclaration intéressante de la femme du banquier anglais, une diaphane et rêveuse personne qui s'exprimait convenablement en français :
    - Entre Laroche et Dijon, j'ai été la proie d'un cauchemar, ou bien j'ai cru l'être : j'ai vu un personnage masqué qui marchait dans le couloir. J'ai trop mangé de homard ! ai-je pensé. Et j'ai refermé les yeux. Maintenant je me demande si cette apparition n'était pas parfaitement réelle, et si je n'ai pas vu le voleur !
    - L'homme au masque était-il grand ou petit, gros ou maigre ?
    - Je ne pourrais le dire. Il est passé trop vite et je ne le découvrais que jusqu'à la ceinture. Néanmoins deux détails m'ont frappée : un nez rouge et un bonnet tricoté de teinte grenat.
    Un éclair traversa les yeux du détective :
    - Faites-moi venir l'architecte de jardins, ordonna-t-il.
    Un moment après, M. Laitance faisait son entrée : chacun put constater qu'il avait le nez proéminent et violacé.
    - Dites-moi, cher monsieur, insinua M. Colerette, posséderiez-vous par hasard un bonnet tricoté ?
    M. Laitance dut en convenir.
    - De quelle teinte ?
    - Brun foncé, je crois.
    - Bref, grenat ?
    - Oui, c'est bien cela : grenat.
    - Cela suffit, conclut le détective : l'air suspect, les propos insolites, l'étiquette sur le sac à main : tout concorde !
    Il y eut un mouvement, un déclic... Deux bracelets d'acier réunis par une chaîne enserraient les poignets de M. Laitance. Chose inattendue, le bizarre personnage, au lieu de protester, éclata en sanglots.
    Dans son sac de voyage, on trouva des postiches diverses et une boîte de maquillage.
    - Nous tenons un des membres de la bande ! triomphait M. Colerette.
    Mais Marinon dit à jean-Jacques dans leur jargon :
    - Phaphiphusiso (Vise-à-gauche se met le doigt dans l'oeil) !
    Ry, de fait, on acquérait bientôt la preuve que l'homme masqué ne pouvait être M. Laitance. Celui-ci était victime d'une tentative d'assassinat !...

    A SUIVRE


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