• le chat de platine

    le chat de platine
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    - Eh, mon oncle, doucement, s'il vous plaît, vous allez me dévisser le poignet !
    C'était la vois de Marinon.
    - Bon sang, grogna le détective, il y a là un trou, dans le fond du coffre !... Les gredins ont fait leur coup par l'arrière. Où es-tu, petite ?
    - Au bas de l'escalier des cabines, devant une porte condamnée.
    - Reste là. Nous te rejoignons.
    Il fallut parcourir tout le couloir, monter à l'étage au-dessus, parcourir l'autre couloir en sens inverse, redescendre d'un étage. En marchant à grands pas, le détective soliloquait :
    - Bien sûr, bien sûr ! J'ai vérifié soigneusement les parois de la chambre-forte lorsque les matelots la montaient. Mais non la paroi du fond, à laquelle je n'ai pas pensé. Parmi les matelots, les bandits avaient des complices, qui se sont arrangés pour substituer à la paroi épaisse une paroi mince. Derrière, il y avait une porte condamnée...  Dès lors, tout s'explique.
    Ils trouvèrent Marinon devant cette porte, au milieu de quoi s'ouvrait un magnifique trou carré, pour lequel il n'avait fallu que quelques coups de burin. Ensuite, le fond du coffre se présentait sous la forme d'une légèr paroi de tôle. C'était bien la peine de mettre tant d'acier sur les autres côtés ! Le trou débouchait tout à gauche du compartiment principal. C'est pourquoi le détective ne l'avait pas aperçu au premier coup d'oeil.
    - Comment as-tu découvert cette issue ? demanda M. Colerette à sa nièce.
    - Heu... En me promenant...
    Le détective s'assit sur l'escalier :
    - Je suis perdu de réputation, gémit-il. Mon honneur était lié à ce Chat de Platine que j'ai déjà sauvé dix fois. Mais à la onzième, je suis battu. Et c'est un désastre...
    - Peut-être pas encore ! risqua Jean-Jacques. Les voleurs sont encore sur ce bateau, avec leur butin. On peut le leur reprendre.
    - Ah, tu t'imagines cela ?... Pauvre naïf !
    M. Colerette se leva, ouvrit un hublot. Il y avait un superbe clair de lune. A un mille et demi de distance, deux ombres rapides fendaient la lame.
    - Tu vois... Ils sont partis en canots automobiles ! soupira le "Cerveau-numéro-un". Dans une heure tout au plus, ils seront en vue des côtes d'Afrique. Il faudrait être une hirondelle pour les rattraper... Non, non, c'est bien fichu ! Que va dire le ras, à son réveil ?... Et les journaux ? Et l'opinion internationale ?
    - Evidemment, reprit-il, je n'aurais pas dû faire cette stupide erreur de jour ! Sinon, naturellement, j'aurais veillé cette nuit. Et les hommes de M. Douze n'auraient pas réussi dans leur attaque, fût-ce par derrière.
    Levant la tête, après un long moment de méditation douloureuse, le détective vit ses neveux debout devant lui, côte à côte, dans une attitude contrite et repentante.
    - Qu'est-ce que vous avez ? leur dit-il.
    - Mon cher oncle, commença Marinon, nous devons t'avouer une grosse sottise que nous avons commise.
    - C'est surtout moi, dit Jean-Jacques.
    - Je t'ai aidé. j'ai aussi ma part de responsabilité, insista Marinon.
    - Enfin, de quoi s'agit-il ? trancha M. Colerette. je n'ai pas la tête à m'occuper de vos menues incartades. Qu"avez-vous fait de mal ?... Vous avez fumé des cigarettes ?... Cassé un vase du salon ?
    - C'est pis que cela, avoua le jeune garçon. A Marseille, nous avons substitué un faux Chat de Platine au vrai. Je voulais faire des essais de moulage.
    - Qu'est-ce que tu dis ? éclata M. Colerette, dont les yeux derechef sortaient de la tête, comme les yeux des homards. Le Chat de Platine qui était dans la chambre-forte n'était pas le vrai ?
    - Non, mon oncke.
    - Alors, où est le vrai, par tous les saints du paradis ?
    - Dans le bloc de pâte à modeler, murmura Jean-Jacques, les yeux baissés. Je te fais toutes mes excuses.
    - Et moi aussi mon oncle.
    L'oncle n'écoutait plus. Les pans de sa robe de chambe écartés comme des ailes, il dansait. Le brave M. Colerette valsait avec grâce, sur l'escalier ! Soudain il s'arrêta :
    - Je vous pardonne, dit-il solennellement. Mais pas un mot de tout ceci ! A personne.
    - Oh, pas de danger, mon oncle. Nous sommes trop contrits de notre étourderie.
    Par le hublot, on n'apercevait plus les canots automobiles. Ils s'étaient enfoncés dans les brumes de l'horizon.


    A SUIVRE


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